En réponse aux tribunes d’Yves Tallineau (RF 137) et de Philippe Valldemosa (RF 138), Eric Mahé, informaticien et photographe, nous livre un point de vue contradictoire… et intéressant! Nous lui avons donc consacré cette tribune pour faire avancer le débat d’idées.

exemple de retouche avec Photoshop

J’ai commencé la photographie il y a plus de trente ans en ayant eu la chance de côtoyer des élèves de Jean-Pierre Sudre ou de Denis Brihat qui surent me donner les bases d’une photographie académique et « saine ». Après une période d’interruption de plus de vingt ans, je me suis remis il y a quatre ans à la photographie en choisissant un compromis qui me semblait idéal à l’époque: prise de vue argentique, scan des négatifs, retouches et impression avec Photoshop. Je suis passé depuis peu au 100 % numérique. Dans sa tribune intitulée « l’éthique d’HCB et les dérives du numérique » M. Tallineau pose une série de questions très intéressantes. Mon premier point de divergence tient à la notion de « modèle de référence ». Pour immense que soit l’œuvre de M. Cartier-Bresson, elle ne constitue en rien une référence absolue pour mes photographies et seules comptent mon imagination, ma sensibilité et les opportunités que mes flâneries de photographe ou de retoucheur peuvent m’offrir. Je ne me sens ni l’obligé ni le dépositaire d’une quelconque éthique qui aurait à me dicter ce que je suis en droit de faire ou de ne pas faire avec mes images. Le mois suivant, dans le même esprit, M. Valldemosa proposait « de constituer « le cercle des photographes humanistes » en confondant la technique et l’honnêteté. En quoi le fait d’utiliser une pellicule Tri-X serait-il plus garant de pureté qu’un capteur CMOS ? Suis-je un artiste de seconde classe ou un imposteur car je préfère utiliser un CoolPix et une souris Logitech ? N’est-ce pas justement l’homme qui fait la valeur d’une technique et non l’inverse? Victor Hugo serait-il moins un génie s’il s’était assis devant le clavier d’un ordinateur ? Il existe à mon avis deux types de photographies qui ne répondent pas aux mêmes exigences de vérité.

– La première est le photojournalisme dont l’obligation est de fournir des images du réel sans traficotage car leur valeur tient justement dans leur intégrité.
– La deuxième – artistique, amateur, industrielle, publicitaire -photographie n’a aucune contrainte et son seul but est de créer de belles ou utiles images à usage commercial ou non.

Et puisqu’il est question de plaisir à la fin des commentaires de M. TaIlineau, plaisir qu’introniserait Henri Cartier-Bresson en alignant le cœur et l’objectif, je me permettrais de souligner qu’il n’existe pas là non plus qu’une seule vérité. Que le plaisir de voir son image se transformer sur l’écran de son ordinateur vaut bien celui d’attendre, en pleine obscurité, l’apparition d’une image latente dans une cuve. Juste une question de goûts personnels!

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